AccueilCinémaAntonio Maria Da Silva, le génie créatif qui a redéfini le mashup...

Antonio Maria Da Silva, le génie créatif qui a redéfini le mashup cinématographique, s’en va

Ce week-end, la famille d’Antonio Maria Da Silva nous a annoncé, via les réseaux sociaux, la disparition de ce réalisateur hors du commun, véritable roi du mashup.

Si vous avez été biberonné à la pop culture des années 80 et 90, si vous êtes cinéphile, et si vous appartenez à cette génération de vagabonds du web des années 2000 – ceux qui pouvaient errer pendant des heures sur la toile à la recherche de nouveaux univers – alors vous savez forcément qui est Antonio Maria Da Silva. Et vous vous souvenez sans doute de la première fois où vous avez plongé dans l’univers de ce génie créatif. Antonio Maria Da Silva incarnait à lui seul ce web des années 2000, un web de passion et de créativité, qui nous manque cruellement aujourd’hui.

Réalisateur et monteur, c’est en 2006 quelques mois à peine après l’émergence des premières plateformes de streaming, comme Dailymotion et YouTube, qu’Antonio Maria Da Silva se fait connaître des passionnés de cinéma et de pop culture. Bien avant l’ère des ‘créateurs de contenu‘ telle qu’on la connaît aujourd’hui, il diffuse un mashup inspiré de la bande dessinée de Frank Miller publiée en 1992, RoboCop versus The Terminator.

Ce mashup, intitulé Terminator vs Robocop, devient rapidement l’une des vidéos les plus virales du web. Il met en scène deux icônes robotiques du cinéma des années 80 et 90. À l’origine, cette vidéo devait rester un projet unique. Mais face à son succès fulgurant, elle devient le premier épisode d’une trilogie, dont les deux volets suivants sortiront respectivement en 2007 et 2010. Antonio Maria Da Silva me confiait  à ce sujet en 2018 dans une interview : ‘J’ai été surpris par le succès du premier film, du coup j’en ai fait deux autres.‘ En 2021, à l’occasion du 15e anniversaire de ce mashup culte, le réalisateur propose une version remasterisée en 2K Scope.

En 2015, Antonio Maria Da Silva réalise un mashup complètement fou de neuf minutes : Hell’s Club. Un lieu hors du temps, en dehors de toute logique, où les personnages fictifs de différents films se rencontrent. Ce club s’appelle Hell’s Club… mais il n’est pas sûr.

Ce mashup halluciné a rapidement fait le tour du web, devenant viral dans le monde entier, jusqu’à être relayé par les médias américains. Antonio me confiait alors qu’un second épisode était en préparation, une suite qu’il considérait comme son ‘plus gros mashup, et certainement le plus complexe à ce jour.Hell’s Club connaîtra finalement deux suites ainsi qu’un épisode dérivé.

Antonio n’était pas simplement un monteur, c’était un véritable conteur. Un narrateur d’un genre nouveau, qui utilisait le mashup pour créer des récits inédits à partir d’œuvres existantes. En jouant avec la métalepse narrative, il nous emmenait à travers plusieurs niveaux de lecture , à condition, bien sûr, d’avoir les clés et la culture cinématographique nécessaires. La vision des auteurs originaux s’y entremêlait avec la sienne, profondément personnelle, ainsi qu’avec notre propre vécu de spectateurs.

Il me confiait au sujet du Hell’s Club : ‘j’ai voulu créer des ramifications en les personnages plus ou moins visibles selon le niveau de cinéphilie de celui qui regarde.Le parfait exemple est la scène de souvenir de John Travolta alias Tony Manero devant le miroir, là il y a une triple lecture selon son degrés de cinéphilie… Tony Manero admire le poster de Al Pacino de Serpico et pleure Carlito Brigante joué par AL Pacino dans mon film, je ne sais pas si vous me suivez. Il y a de l’intra, de l’extra et même du meta diégétique dans une même scène.Le processus était compliqué pour cette scène et cette scène peut être comprise à plusieurs niveaux, sans qu’un sens ne gâche l’autre.

En tant que génie créatif, Antonio Maria Da Silva cherchait sans cesse à repousser les limites de son art. Après plusieurs mashups comme Hell’s Club, The Carrie Mirror, The Psycho Mirror, son hommage très personnel à Bruce Lee – qui occupait une place toute particulière dans son cœur – ou encore sa relecture des escaliers du Cuirassé Potemkine, Star Wars : Battle of the Dark Side, Boogeymen’s Anthology: Michael vs Jason et Christmas Invasion, il élève le mashup au rang d’œuvre d’art avec The Overlook Hotel, en 2018.

Par sa durée, environ 30 minutes, par la structure narrative qu’il propose et la présence d’un narrateur, The Overlook Hotel s’apparente davantage à un véritable film. Ce mashup immersif rend hommage aux grands classiques de l’horreur tels que Shining, L’Exorciste, Psychose, entre autres. The Overlook Hotel est aussi une réflexion sur l’imaginaire de l’épouvante, une plongée dans les codes du genre, et surtout un projet profondément personnel. Il y rend hommage, peut-être de la plus belle des façons, à deux de ses artistes favoris : Stephen King et Jack Nicholson.

En 2019, Antonio Maria Da Silva poursuit son exploration du mashup narratif avec Rocky Balboa vs Jake LaMotta. Puis, en 2020, il franchit une nouvelle étape en signant le tout premier long métrage mashup – un projet initié en 2017 – construit selon une narration classique, dans la pure tradition du blockbuster d’aventure américain. Intitulé Dinosaur Hunters, le titre joue sur un double sens : Antonio souhaitait à la fois mettre en scène de véritables dinosaures… et confronter ces créatures préhistoriques aux ‘dinosaures’ du cinéma d’action des années 80 et 90. Il en résulte un film à la fois ludique, spectaculaire, empreint de nostalgie, mais aussi porteur d’un message écologique discret mais bien présent.

En 2023, Antonio Maria Da Silva récidive avec Rambo vs Predator, un mashup de 1h17 qui confronte deux icônes absolues du cinéma d’action des années 80. Plus qu’un simple choc de légendes, ce film hybride est à la fois un hommage à cette époque dorée du cinéma musclé, et une réflexion sur le temps qui passe, sur l’usure des héros… et des mythes. Ce mashup monumental a battu plusieurs records sur sa chaîne, cumulant plus de 21 millions de vues sur YouTube.

À cette même période, Antonio préparait ce qu’il qualifiait lui-même comme le plus gros projet de mashup de sa vie : Moonwalker 2. Un film mashup de près de trois heures, imaginé comme un biopic fantastique de Michael Jackson.

Début mai, il confiait sur ses réseaux sociaux : ‘Le film est dans la dernière phase de post-production. C’est un moment charnière pour moi. Je bosse sur le projet de manière différente de d’habitude, je m’adapte aux nouvelles technologies, mais toujours avec le souci du réalisme. Je suis en train de poser les dialogues originaux du film (1200 phrases, tout est déjà enregistré heureusement). Je dois synchroniser les lèvres, retoucher le montage des dialogues pour avoir le bon rythme… Pas une mince affaire quand on part de rien, mais maintenant, c’est presque une formalité. Bref, j’aurai mis un an et sept mois pour le réaliser. Avec, bien sûr, des pauses de plusieurs semaines pour bosser sur d’autres choses. Je suis impatient de vous le montrer.

La mise en ligne de Moonwalker 2 était prévue pour cette année. Et comme toujours, Antonio regardait déjà plus loin. Il travaillait en parallèle sur un second projet encore plus ambitieux, combinant son savoir-faire unique avec les possibilités de l’intelligence artificielle : Back to the Future 4, une suite directe imaginée du troisième volet, avec évidemment Michael J. Fox et Christopher Lloyd. Il déclarait alors sur Twitter (X) : ‘Une nouvelle ère s’ouvre pour les mashups, qui utilisent les nouvelles technologies de manière intelligente…

Ces deux projets, qui promettaient de repousser une fois encore les limites du mashup, resteront à l’état de rêves… dans l’esprit du génie créatif qu’était Antonio Maria Da Silva.

Nous parlions régulièrement en privé avec Antonio. On discutait de ses idées, de ses avancées, de ses doutes. C’était un créatif qui m’a profondément influencé. Sa chaîne YouTube a cumulé des millions de vues, mais son travail méritait encore davantage de reconnaissance, d’exposition, de mise en lumière.

Avec la disparition d’Antonio Maria Da Silva, c’est aussi tout une époque du web qui s’en va avec lui. Je ne peux que vous inviter à parcourir sa chaîne YouTube. (Re)découvrez ses œuvres.

Merci de nous avoir fait rêver, Antonio.

Votre soutien est important pour Eklecty-City, retrouvez toutes les actualités pop culture sur les réseaux sociaux : Facebook, BlueSky, Instagram, Twitter.

Vous avez aimé ? Partagez :

Thomas
Thomas
Rédacteur en chef et chroniqueur anti-protocolaire. Enfant des années 80's / 90’s biberonné à la Pop Culture. Ancien administrateur et rédacteur des sites et forums francophones dédiés à l'univers de Metal Gear.

Sur le même sujet

LAISSER UN COMMENTAIRE

Veuillez saisir votre commentaire !
Veuillez entrer votre nom ici