Spin-off ou chapitre clé ? Metal Gear Solid : Portable Ops reste au centre d’un débat sur la continuité officielle de la saga MGS.
La franchise Metal Gear se compose surtout d’épisodes canoniques, mais certains jeux ne font pas partie de la trame principale et sont classés hors du canon. C’est le cas de Metal Gear: Snake’s Revenge, sorti en 1990 sur NES sans la participation de Hideo Kojima. La même année, le véritable second opus officiel, Metal Gear 2: Solid Snake, sort sur MSX2.
D’autres titres suivent la même voie. On retrouve Metal Gear Solid: Ghost Babel en 2000, Metal Gear Solid Touch en 2009, ainsi que Metal Gear Acid et Metal Gear Acid 2, parus respectivement en 2004 et 2005 sur PSP. Metal Gear Rising: Revengeance occupe aussi une place particulière. Initialement pensé comme un épisode canonique situé entre Metal Gear Solid 2: Sons of Liberty et Metal Gear Solid 4: Guns of the Patriots, il devait raconter la transformation de Raiden en ninja et le sauvetage de Sunny, la fille d’Olga Gurlukovich. Mais face aux difficultés de Kojima Productions, le projet passe chez PlatinumGames, qui repart de zéro. Le jeu se situe finalement après MGS4, mais il ne fait pas partie de la chronologie officielle.
Enfin, un cas continue d’interroger les fans : Metal Gear Solid: Portable Ops. Développé par Kojima Productions sous la direction de Masahiro Yamamoto et écrit par Gakuto Mikumo, cet épisode PSP sort en 2006. Présenté comme canonique lors de sa sortie, il est par la suite mis de côté après ‘Peace Walker’. Pourtant, plusieurs éléments de son intrigue restent essentiels pour comprendre l’évolution de Big Boss.
De quoi parle Metal Gear Solid: Portable Ops ?
En 1970, six ans après les événements de ‘Snake Eater’, Naked Snake se retrouve prisonnier en Colombie, capturé par l’unité FOX devenue renégate. Accusé de trahison, il partage sa cellule avec Roy Campbell, unique survivant d’une équipe de Green Berets envoyée en reconnaissance. Pour laver son nom et mettre fin à la rébellion, Snake doit s’échapper et affronter ses anciens camarades dirigés par Gene, un commandant créé artificiellement pour devenir le chef militaire parfait.
Le jeu conserve les bases d’infiltration de la saga mais ajoute une nouveauté majeure : le Comrade System. Snake doit recruter des alliés et composer une escouade de quatre membres avant chaque mission. Les recrues peuvent être d’anciens ennemis capturés, des personnages uniques ou même des soldats obtenus via les fonctionnalités Wi-Fi et GPS de la PSP. Chaque membre a ses forces et ses faiblesses : certains excellent au combat, d’autres se spécialisent dans le soin, le renseignement ou la production d’objets.
L’histoire fait intervenir plusieurs personnages : Gene, principal antagoniste, poursuit le rêve de bâtir une nation de soldats appelée ‘Army’s Heaven’. Snake affronte aussi Python, un ancien camarade présumé mort au Vietnam, ainsi que Null (Gray Fox), un adolescent transformé en tueur programmé. Elisa, une jeune femme dotée de pouvoirs psychiques et marquée par la catastrophe nucléaire de Kychtym, joue un rôle clé avec sa double personnalité Ursula. Entre révélations, trahisons et affrontements, Snake découvre les manipulations du Pentagone et les véritables intentions de ses anciens alliés.
Le récit culmine avec la destruction d’un prototype de Metal Gear et la défaite de Gene. Avant de mourir, celui-ci lègue à Snake ses ressources, ses soldats et ses fonds, l’invitant à bâtir sa propre armée. Snake utilise cet héritage pour fonder FOXHOUND, tandis qu’Ocelot poursuit en coulisse ses propres intrigues liées aux Philosophes. Le jeu pose ainsi plusieurs bases de la future transformation de Snake en Big Boss et amorce la naissance d’Outer Heaven.
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Quelle est la place de ‘Portable Ops’ dans le canon ?
Lors de sa sortie, ‘Portable Ops’ est présenté comme un chapitre canonique de la série. Contrairement aux spin-off précédents sur PSP, il adopte un gameplay fidèle aux épisodes principaux et s’inscrit directement après ‘Snake Eater’. Konami et Kojima Productions l’intègrent dans leurs chronologies officielles, et la famuse Database de MGS4 inclut même ses personnages et événements. Hideo Kojima affirme en 2006 à IGN que l’histoire de MPO est nécessaire pour préparer celle de MGS4 : ‘Si vous modifiez l’histoire d’Ops, vous devez modifier celle de 4. Si vous modifiez celle de 4, il devient également nécessaire de modifier celle d’Ops. Tant que l’histoire d’Ops n’est pas terminée, celle de 4 ne peut pas être finalisée.‘
Mais en 2010, la sortie de Metal Gear Solid: Peace Walker change la perception. Écrit et dirigé par Hideo Kojima lui-même, le jeu est présenté comme la suite de ‘Snake Eater’, mais se déroule quatre ans après ‘Portable Ops’. Bien que certains personnages évoquent les événements de MPO, la référence reste discrète. Kazuhira Miller déclare dès le début : ‘Enfin, on peut laisser derrière nous toutes ces histoires de San Hieronymo…‘ Cette réplique contribue à minimiser l’importance de MPO dans la continuité immédiate de la saga.
La communication officielle devient alors ambiguë. Certaines timelines publiées par Konami ou Kojima Productions omettent totalement MPO, tandis que d’autres continuent de l’inclure dans ‘l’histoire de Big Boss‘. Hideo Kojima finit par clarifier sa vision en 2014 via une interview avec Geoff Keighley. Selon lui, la trame de ‘Portable Ops’ appartient bien à la saga, mais il préfère distinguer les épisodes qu’il écrit et réalise de ceux où il agit seulement comme producteur. Ainsi, il accorde plus de poids aux jeux signés de sa main, tout en reconnaissant que les événements de MPO existent dans l’univers de la série.
En 2023, Konami réaffirme la place de ‘Portable Ops’ dans le canon avec la sortie de la Master Book Series qui accompagne la Metal Gear Solid Master Collection.
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Un épisode incontournable
Ainsi, même si Metal Gear Solid: Portable Ops reste perçu comme un épisode secondaire, il fait bien partie de la chronologie officielle, contrairement à Metal Gear Rising: Revengeance. Les événements du jeu posent les bases de l’armée personnelle de Big Boss et amorcent la création d’Outer Heaven.
Après Metal Gear Solid Delta, un hybride entre remaster et remake de Snake Eater, il serait pertinent que Konami s’intéresse aux épisodes portables et canoniques de la série, ‘Portable Ops’ et ‘Peace Walker’, afin que les fans comme les nouveaux venus puissent poursuivre l’histoire de Big Boss sur les consoles actuelles, jusqu’à sa conclusion avec ‘Ground Zeroes’ et ‘The Phantom Pain’. Ces deux volets comptent parmi les meilleurs de la saga et méritent aujourd’hui d’être redécouverts.